Où sont passées l’opposition et la société civile qui ont en grande partie contribué à la chute d’Ali Bongo, jusqu’à la lie, en dénonçant pendant 14 ans sa magistrature et en adoubant le coup d’Etat du nouvel homme fort du Gabon le président de la transition Brice Clotaire Oligui Nguema ?
Qu’est donc devenue l’opposition conduite par André Mba Obame qui a vite fait de dénoncer « la légion étrangère » ? Où est passée l’opposition d’Alexandre Barro Chambrier qui avait claqué la porte de la formation présidentielle, le Parti démocratique gabonais et décrié la mal gouvernance des « profito-situationnistes » ? Où est passée l’opposition de Jean Ping qui jusqu’au-boutisme a refusé de reconnaître la victoire à la présidentielle 2016, entachée de fraude d’Ali Bongo, malgré les pressions de ce dernier ? Quid de la société civile conduite par Marc Ona Essangui, poil à gratter du régime d’Ali Bongo, lauréat du prix Africa Goldman Environmental Prize 2009, qui s’est opposé à l’installation au Gabon de la toute-puissante Olam ?
Si promptes à dégainer le régime d’Ali Bongo à la moindre occasion, en tirant à boulets rouge, l’opposition et la société civile semblent désormais murer dans un silence.
Le décès du jeune compatriote Karl Stecy Akue Angoue dans des conditions atroces par des hommes en tenue aux heures de couvre-feu, l’audience accordée aux «femmes de Ngouoni» par la «distinguée première dame de la Transition», les propos va-t-en-guerre d’Oligui Nguema – «Alors, qu’ils nous mettent tous dans le noir et je verrai là où ils seront», et «J’ai ici les services de renseignement», adressés au syndicat de la Société d’Energie et d’Eau du Gabon, lors de sa tournée républicaine à Ndendé dans la province de la Ngounié : l’opposition et la société civile font désormais profil bas.
Faut-il y voir dans ce silence de l’opposition et de la société civile, un lien avec les propos du président de la transition qui avait déclaré en septembre dernier qu’ « Il n’y a plus de majorité ni d’opposition. Pour qu’il y ait majorité ou opposition, il faut un parti de la majorité au pouvoir et vice versa. Or, dans notre cas, nous ne sommes pas un parti » ? Faut-il y voir un rapport avec la nomination de plusieurs membres de l’opposition et de la société au Palais Rénovation, au gouvernement et au Parlement ?
L’opposition et la société civile sont-elles désormais réduites à encenser le président de la transition à l’exemple de Laurence Ndong figure de l’opposition au sein de la diaspora ?
« beaucoup de Gabonais considèrent le général Brice Oligui Nguema comme un messie, comme un bienfaiteur », avait déclaré Laurence Ndong, avant d’ajouter qu’elle souhaitait le voir candidat à la présidentielle, sur les ondes de Radio France internationale.
A cette allure, le régime du nouveau locataire du Palais Rénovation porte les germes de son autodestruction, car un pouvoir sans contre-pouvoir, même dans le cas d’espèce d’une transition, est nécessairement voué à sa perte.
La preuve Ali Bongo en croyant bien faire en muselant l’opposition et la société civile pour assoir son régime était inéluctablement condamner à être chassé du pouvoir, soit par la rue ou par l’armée. Son destin a été scellé par la grande muette, Dieu merci sans effusion de sang.