Une réponse aux détracteurs des militaires au pouvoir
Ce discours intervient alors que, le 8 janvier, des figures de l’opposition telles qu’Albert Ondo Ossa, ancien candidat à la présidentielle, Alain-Claude Bilie-By-Nze, ex-Premier ministre, Pierre-Claver Maganga Moussavou, ancien vice-président, et Ali Akbar Onanga Y’Obégué, ex-ministre, tenaient une conférence de presse commune. Lors de cet événement, ils avaient demandé que les militaires retournent dans leurs casernes à la fin de la transition et soient exclus des futures élections.
En effet, ils demandent une interdiction formelle pour tout membre des forces armées de se présenter aux prochaines élections, conformément aux articles de la Constitution et aux engagements internationaux, notamment la Charte africaine de la démocratie. « Toute tentative de candidature d’un militaire compromettrait la crédibilité du pays et pourrait entraîner des sanctions internationales », alertent-ils.
Dans une interview exclusive accordée à Le Confidentiel, Ali Akbar Onanga Y’Obègue a alerté sur les dérives actuelles, les risques d’isolement diplomatique et les violations des principes démocratiques, en cas de candidature d’un membre du Comité pour la transition et la restauration des institutions, faisant bien entendu allusion à Oligui Nguema.
Séraphin Moudounga a saisi l’opportunité pour répondre à ces critiques. Il a défendu avec ferveur la légitimité des militaires à jouer un rôle politique dans un contexte de transition, affirmant que leur expérience et leur engagement sont essentiels pour consolider les bases d’un nouveau régime. « Lorsqu’il y a un basculement vers un nouveau régime, il est bon que ce soient les initiateurs de ce basculement qui assurent sa consolidation avant de laisser le bébé se débrouiller par lui-même », a-t-il déclaré, sous un tonnerre d’applaudissements.
Des références historiques pour soutenir son propos
Pour appuyer son argumentation, Moudounga a cité deux exemples historiques emblématiques. Il a d’abord évoqué George Washington, général et premier président des États-Unis, qui a joué un rôle clé dans la stabilisation de l’État après les guerres d’indépendance et dans l’adoption de la Constitution de 1789. « Aux États-Unis, après les guerres d’indépendance, c’est le général George Washington qui a été appelé à consolider le processus démocratique nouvellement né », a-t-il rappelé.
Ensuite, il a cité Charles de Gaulle, général de brigade, qui fut appelé par le président René Coty à stabiliser la France en pleine crise sous la IVᵉ République. Moudounga a mis en avant la manière dont De Gaulle a instauré la Constitution de 1958 et le régime semi-présidentiel pour assurer la pérennité de l’État. « Le Général de Gaulle, après avoir taillé la Constitution de 1958, n’a pas laissé le bébé entre les mains d’ouvriers mal habillés », a-t-il ajouté, provoquant une nouvelle salve d’applaudissements.
Une interrogation qui en dit long
Dans la conclusion de son discours, Séraphin Moudounga s’est adressé directement à Brice Clotaire Oligui Nguema. « Nous nous posons la question, monsieur le président : Vous avez posé la question au peuple gabonais, si oui ou non à la Constitution de la libération. Le peuple gabonais a répondu massivement par un oui. Et aujourd’hui, le peuple gabonais se demande : si nous posons une question à Brice Clotaire Oligui Nguema, répondra-t-il par un oui ou par un non ? »
Ces propos, perçus comme un appel clair à la candidature du président de la transition, ont été accueillis par des applaudissements nourris de l’assistance, marquant un moment fort de cette cérémonie.
Une polarisation croissante
Le discours de Séraphin Moudounga souligne une polarisation croissante sur la scène politique gabonaise au sujet de la candidature de Brice Clotaire Oligui Nguema à la prochaine présidentielle. Alors que certains appellent à un retour des militaires dans les casernes, d’autres, comme Moudounga, plaident pour un rôle prolongé de ces derniers dans la transition. Cette divergence d’opinion reflète les défis auxquels le Gabon est confronté dans cette période cruciale de son histoire politique.
Depuis sa prise de pouvoir le 30 août 2023, suite au coup d’État ayant renversé Ali Bongo Ondimba, Brice Clotaire Oligui Nguema ne s’est jamais publiquement prononcé sur une éventuelle candidature à la présidentielle, laissant planer le doute sur ses intentions politiques.