Gabonreview en a déjà fait état, en juin 2012 lors de la sortie du documentaire consacré au dieu jamaïcain du Reggae, tout simplement titré «Marley» (Lire « One Love: Bob Marley, Pascaline Bongo »). On le savait donc déjà : La première fille du second président du Gabon, Pascaline Mferri Bongo, a été l’une des amantes de la plus grande star musicale du XXème siècle jamais sortie du tiers-monde.
Un tout nouveau livre, titré « Bob Marley et la fille du dictateur », revient plus en détails sur cette liaison amoureuse au sujet de laquelle beaucoup de gabonais sont sceptiques, estimant que Pascaline Bongo surajoutait et en faisait un peu trop quant à sa relation furtive avec une star en ayant vu des vertes et des pas mûres en matière de beautés féminines. Paru le 7 avril dernier, l’ouvrage est l’œuvre d’Anne-Sophie Jahn, 34 ans, journaliste au magazine d’actualité hebdomadaire français Le Point. L’auteure a travaillé pour le New York Sun, C8, Arte, et elle avait déjà commis un autre ouvrage : « Les Sept Péchés capitaux du rock » (Flammarion).
Si Gabonreview n’a pas eu l’occasion d’en lire déjà tout le contenu, le dossier de presse du livre commence par « Tu es vilaine », première phrase que Bob Marley avait lancée à Pascaline Bongo lors de leur première rencontre, le 23 novembre 1979 aux États-Unis. La scène se déroulait dans les vestiaires d’une salle de basket de la prestigieuse université californienne UCLA. Le porte-étendard du Reggae venait alors de donner un concert devant 15 000 fans.
Étudiante en master d’administration publique aux États-Unis, alors âgée de 23 ans, Pascaline Bongo, médusée et n’ayant pas l’habitude d’être rabrouée, aurait regardé la superstar droit dans les yeux avant d’éclater de rire. Marley lui aurait expliqué que ce n’était pas littéral. Il voulait dire qu’il n’aimait pas le fait qu’elle avait les cheveux défrisés. Il y a, en effet, que pour les rastas, les cheveux sont sacrés, ils ne doivent être ni coupés, ni coiffés. Un an auparavant, la première fille d’Omar Bongo avait assisté à un concert de la légende du Reggae à Paris. Elle connaissait déjà toutes ses chansons par cœur et adorait particulièrement la sensualité de l’une d’elles, « Stir It Up ». Elle aimait la façon dont Bob Marley abordait les thèmes de l’amour, sa manière de prêcher de la foi en Dieu, sa musique… tout en Marley la subjuguait. Elle lui demandera alors s’il pouvait venir au Gabon pour jouer à l’anniversaire de son père.
Bob Marley est finalement venu jouer à Libreville en Janvier 1980. Les Wailers qui n’étaient encore jamais venus en Afrique découvrent alors une capitale gabonaise plutôt moderne, trois ans après le sommet de l’Organisation de l’Unité africaine (OUA, ex-Union africaine – UA). À la faveur de cet évènement, la ville avait en effet été enjolivée au terme de grands travaux publics et architecturaux. Pas moins lucide, malgré les tonnes de ganja consommées, la tribu rasta perçut tout de même un pays inégalitaire, avec une grande partie de la population vivant dans la pauvreté extrême.
De nombreux librevillois ne pouvant se payer le ticket d’accès au concert, Bob Marley insistera d’ailleurs pour que tous les badauds restés hors du gymnase du stade omnisport Omar Bongo puissent y assister gratuitement. Ce qui sera fait. « Nous ne savions pas qu’Omar Bongo était un dictateur », regrette Junior Marvin, guitariste solo des Wailers, qui fera pourtant d’autres séjours à Libreville sans les Wailers. « Ils n’étaient pas colonisés mais ils n’étaient pas libres. Le Gabon était un pays néocolonial dirigé par un homme noir », regrette pour sa part Judy Mowatt, choriste des Wailers aux côtés de Rita Marley.
« Could You Be Loved », une chanson dédiée à Pascaline Bongo ?
Le livre est bourré d’anecdotes où l’on découvre notamment que le premier enfant de Pascaline Bongo avec Jean Ping, une fille, est prénommée Nesta, en souvenir de Bob Marley dont le nom pour l’état-civil était Robert Nesta Marley ; qu’Omar Bongo avait été le seul chef d’État à proposer qu’Haïlé Sélassié s’installe au Gabon après sa chute du pouvoir (de quoi forcer le respect et l’admiration des rastas pour qui l’empereur Ethiopien était Jah, l’incarnation de Dieu); que malgré la différence des mondes qui séparait Marley et Pascaline Mferri (11 ans de mois que la star), il s’en suivra une histoire d’amour qui ne débute réellement qu’à Libreville et qui sera « pas cachée mais pas publique », selon le témoignage de Junior Marvin ; que Pascaline Mferri a assisté de près à la production d’« Uprising », le dernier album de Bob Marley and The Wailers ; que la chanson « Could You Be Loved » a dû être écrite pour elle ; que la fille d’Omar Bongo a fêté ses 24 ans dans la villa jamaïcaine de Marley ; que Cedella, la mère de Bob, la décrit comme la femme la plus attentive et aimante que Marley ait connue, celle qui restait avec lui dans les pires moments, même durant l’ultime maladie ; que Pascaline Mferri était là, en larmes, le 21 mai 1981 à Nine Miles en Jamaïque, à l’enterrement du grand chanteur, etc. etc.
Anne-Sophie Jahn, auteure du livre, a enquêté pendant deux ans à Paris, Los Angeles et en Jamaïque. Après l’avoir littéralement harcelée, elle a recueilli le témoignage inédit de Pascaline Bongo dont le récit mêle scènes et confidences, solos et foules en transe, sur un ton libre, brûlant. Ayant quitté la terre des hommes à 36 ans, la plus grande star musicale du XXème siècle revit ainsi à travers ce livre : « Bob Marley et la fille du dictateur », d’Anne-Sophie Jahn, éd. Grasset, 224 pages.