Un projet pour des scrutins modernes
Le projet de loi vise à poser les bases d’élections libres, transparentes, équitables et démocratiques pour les prochaines élections générales, dont sans doute la plus attendue, la présidentielle post-transition. Le code électoral en cours d’examen aspire à rénover le cadre juridique en s’appuyant sur les meilleures pratiques internationales, renforçant ainsi la crédibilité des institutions électorales. Cependant, l’absence de révision du découpage des circonscriptions limite la portée de cet examen, remet en question l’équilibre de la représentation parlementaire et, par conséquent, la crédibilité des futures élections.
Un découpage électoral inégalitaire ignoré
Si la Cour constitutionnelle dirigée par Marie-Madeleine Mbourantsouo a souvent été perçue comme une institution biaisée, validant systématiquement des résultats de scrutins entachés de fraudes en faveur des régimes d’Omar Bongo Ondimba puis de son successeur Ali Bongo, le découpage électoral taillé sur mesure pour le pouvoir a également joué un rôle majeur dans le maintien des Bongo.
Depuis des décennies, le découpage électoral au Gabon est critiqué pour ses disparités flagrantes. La province de l’Estuaire, qui regroupe 49 % de la population nationale (895 689 habitants) et 261 841 électeurs inscrits, n’élira que 18 % des députés. À l’inverse, le Haut-Ogooué, le fief politique des Bongo, avec seulement 14 % de la population (250 799 habitants) et 71 123 électeurs inscrits, occupe 16 % des sièges.
Des provinces historiquement frondeuses, telles que l’Ogooué-Maritime et le Moyen-Ogooué, continuent d’être sous-représentées. La première, avec une population de 157 562 habitants et 62 133 électeurs inscrits, ne dispose que de 13 sièges, un nombre quasi équivalent à des provinces moins peuplées et favorables au régime.
Un cadre juridique transitoire permissif
La révision constitutionnelle de 2023 a permis au gouvernement de maintenir le découpage électoral actuel. L’article 76 de la nouvelle Constitution interdit toute modification des circonscriptions électorales dans l’année précédant une élection. Cependant, l’article 171, adopté lors du référendum du 16 novembre dernier, prévoit une exception pour les premiers scrutins post-transition.
En conséquence, la composition des chambres parlementaires reste inchangée : 143 députés pour l’Assemblée nationale et 67 membres pour le Sénat, dont 15 sont nommés par le chef de l’État.
Une réforme attendue
Le maintien du statu quo électoral, malgré la volonté affichée de modernisation, alimente des accusations de partialité et de manipulation politique. Si l’examen du projet de loi organique marque une étape importante dans la refonte du cadre électoral gabonais, l’absence de révision du découpage électoral en limite la portée. La transition actuelle offrait pourtant une opportunité historique de redéfinir les règles du jeu pour garantir une véritable équité entre les provinces.
Pour l’heure, le futur Parlement gabonais reflètera les disparités démographiques et électorales actuelles, suscitant des inquiétudes quant à la légitimité de la future représentation nationale.