Un fichier électoral jugé illégal
Les membres de l’Initiative estiment que le fichier électoral utilisé par le gouvernement est contraire au droit en vigueur. En cause, l’entrée en vigueur du nouveau code électoral (loi n°001-2025 du 19 janvier 2025, promulguée le 22 janvier 2025), qui impose la mise en place d’un fichier électoral biométrique national. Conformément au principe de l’application immédiate de la loi nouvelle, les autorités devraient mettre en place un fichier électoral conforme aux exigences du nouveau code. Or, l’élection présidentielle repose encore sur l’ancien fichier, ce qui la rend juridiquement invalide, selon les responsables politiques.
Un processus électoral contesté
Au-delà des considérations juridiques, l’Initiative dénonce un processus électoral accéléré et déséquilibré. Selon les conférenciers, plusieurs éléments démontrent une volonté manifeste de biaiser la présidentielle du 12 avril.
L’avancement de la date du scrutin : Les responsables de l’Initiative soulignent que l’accélération de la date du scrutin, fixée au 12 avril, ne laisse pas suffisamment de temps pour organiser un processus électoral juste, inclusif et transparent.
L’exclusion de certains adversaires potentiels
L’Initiative dénonce des règles anticonstitutionnelles et discriminatoires qui limitent la participation d’autres candidats, en violation de l’équité et de la transparence du processus électoral.
Le verrouillage des organes de contrôle électoral
Le rôle des organes chargés de superviser le processus électoral, notamment l’Autorité de Contrôle des Elections et du Référendum (ACER), est jugé compromis. Leur indépendance est mise en question, ce qui crée un climat de manipulation électorale.
Des anomalies techniques préoccupantes
Sur le plan technique, plusieurs irrégularités ont été pointées par l’Initiative, compromettant la fiabilité du fichier électoral. Parmi les anomalies relevées, on note des inscriptions multiples permettant à certaines personnes de voter plusieurs fois et la présence d’électeurs décédés toujours inscrits sur les listes électorales.
Des inégalités géographiques, avec un déséquilibre dans la répartition des électeurs entre les différentes zones géographiques, ce qui donne un avantage à certaines régions et l’absence de contrôle biométrique, rendant difficile la vérification fiable de l’identité des électeurs. Et l’absence de supervision par l’ACER, ce qui remet en question la transparence et la crédibilité du processus électoral.
Ces anomalies, selon les responsables, compromettent l’intégrité du scrutin et rendent inacceptable une élection fondée sur un fichier électoral défectueux.
Un recours imminent devant la Cour constitutionnelle
Face à ces constats, l’Initiative annonce qu’elle saisira la Cour constitutionnelle dès le 3 mars 2025 avec une requête en inconstitutionnalité. Cette action juridique reposera sur plusieurs points.
L’application immédiate du nouveau code électoral, qui rend caduc tout fichier électoral établi sous l’empire de l’ancien code et l’illégalité des arrêtés ministériels, qui régissent actuellement le processus électoral et qui sont jugés contraires à la Constitution. La discrimination entre électeurs engendrée par l’existence de certaines candidatures irrégulières et les conditions imposées pour leur validation.
L’objectif de cette démarche est d’obtenir l’invalidation du fichier électoral actuel et de demander la mise en place d’une nouvelle liste électorale conforme aux exigences légales et aux normes de transparence.
Ils ont dit…
Pierre Claver Maganga Moussavou
« C’est une aberration. Il est une chose que d’avoir le courage, d’avoir des langues nationales, vous choisissez 4, 5 si vous voulez, comme dans d’autres pays, pour qu’on puisse s’exprimer et se comprendre.
Mais exiger à un candidat à l’élection présidentielle de parler la langue suppose que pendant cette élection, il utilise cette langue. Il est impossible, il y a plus de 52 langues, de ne parler qu’une seule langue et de se faire comprendre par tout le monde », a déclaré Maganga Moussavou.
Selon Maganga Moussavou : « Un général d’opérette vient s’imposer à nous, et voilà. On a formé des élites. Un pays où l’exemple doit prendre place. Plus d’exemples, plus de mérites. C’est celui qui a les armes qui peut s’imposer. Comment voulez-vous que Ondo Ossa, mené par l’Alternance 2023, il y a moins de deux ans, candidat à l’élection présidentielle. Maganga Moussavou, candidat aux élections présidentielles, de moins de deux ans après, on puisse dire qu’ils sont out, qu’ils ne sont plus rien. »
« Je n’ai peur de rien. Même quand Bongo était Bongo. Quand je devais claquer la porte, je l’ai fait. Moi, je préfère présenter ma candidature et qu’on puisse me dire que je ne peux pas. Et je prendrai d’autres voies. Parce que je n’arrêterai pas le combat. Pour une exclusion à une élection présidentielle. Vous avez des commissions médicales qui voient si vous êtes apte à assumer telle ou telle fonction. Cela suffit largement. », a-t-il également déclaré.
Alain-Claude Bilie-By-Nze
« La nation gabonaise est jeune, elle est en construction. Et son équilibre est extrêmement fragile. Et le CTRI et son principal responsable jouent avec le feu. Ils sont en train de libérer la bête, pour que les Gabonais se regardent en chien de faïence, autour de la grande expression « Bia bibeuleu, c’est nous qui avons désormais. » », a déclaré Alain-Claude Bilie-By-Nze.
« Un État ne se construit pas comme ça. Et une nation encore moins. Mais on ne peut pas tolérer que dans un pays en construction, il y ait des appels à candidatures fondées sur des ethnies. Telle ethnie, tel regroupement ethnique, telle association ethnique appelle à la candidature. Nous parlons d’une nation. Et ceux qui gèrent l’État aujourd’hui doivent avoir conscience », selon Alain-Claude Bilie-By-Nze.
« Je suis Fang. Je parle en zamane. Mais je suis Gabonais avant tout. Et en tant que Gabonais, en tant que Fang, je suis plus proche de Maganga Moussavou qui est Punu de Mouila que du Fang de Ebebiyin qui est d’un autre pays. », a-t-il déclaré.
Selon Alain-Claude Bilie-By-Nze : « On parle du pays. Et lorsqu’on se bat pour notre pays, c’est intolérable ce qui s’est passé. Qu’on vienne s’adresser à une partie du Gabon, dans une des langues du Gabon, pour appeler les Gabonais à se comporter d’une certaine façon. Et que cela n’ait pas été dénoncé par les médias, la presse, les Gabonaises et les Gabonais, ça pose question sur l’idée que nous avons de notre pays. C’est qu’on est prêts à tout accepter. », a-t-il dénoncé.
« Mais venant de la part de quelqu’un qui porte des galons et dont le métier aurait dû être la défense d’abord de l’indépendance du pays, c’est intolérable. Ce qui est en train de se passer aujourd’hui à Angondje (Ndlr, au même moment Brice Clotaire Oligui Nguema tenait une rencontre avec les forces de défense et de sécurité au stade de l’Amitié), notez-le bien, c’est inédit. Dans cette salle, il y a quelques semaines, nous nous sommes inquiétés de cette décision qui autorise les militaires à être candidats. », a-t-il dit.
« Et j’avais dit qu’on va transformer les casernes en partis politiques. Lorsqu’on réunit les militaires, qu’on leur demande de venir avec des membres de leur famille pour se rendre au stade, à l’occasion des meetings, nous n’avons plus d’armée. Lorsqu’on fait cela, c’est fini de l’armée républicaine. C’en est fini de l’armée nation. Ce n’est plus une armée. C’est un groupement politique armé. Et c’est ça qu’on appelle une milice. Mais l’armée gabonaise ne peut pas être une milice. Nous refusons cela. C’est l’armée de la République. C’est l’armée de la nation. Elle ne peut pas être ça. », a-t-il affirmé.
« J’entends beaucoup de Gabonais dire c’est déjà tout est verrouillé. Il faut faire attention à ce genre de discours. En 1993 tout semblait verrouillé. En 1998, tout semblait verrouillé. En 2009 tout semblait verrouillé. En 2023 tout semblait verrouillé, il y a toujours le petit grain de sable que personne n’avait prévu et qui arrive. Faisons en sorte que le grain de sable n’arrive pas. Il est encore temps de mieux organiser les choses. L’élection présidentielle pour un retour à l’ordre constitutionnel ne peut pas être une mascarade », a-t-il prévenu.
« Ça aurait dû être un élément d’apaisement général. Tous les Gabonais qui aspirent à diriger le pays auraient dû être autour d’une même table. Au contraire, nous assistons aujourd’hui à une exclusion massive. Je considère que tout ce qui est en train de se passer actuellement dans la préparation de cette élection est d’abord une entorse manifeste à la Constitution, au droit et à la justice. », a conclu le responsable.