D’un côté, un président du conseil d’administration (PCA), Landry Bongo Ondimba, demande, sans sourciller, le décaissement de 46 200 000 FCFA pour financer sa campagne en faveur du « OUI » au référendum du 16 novembre dernier. De l’autre, un administrateur-directeur général (ADG), François Owono Messie, engage les finances de l’entreprise en réglant des frais de restauration de près de 9 375 000 FCFA auprès d’une société spécialisée… dans le placement de personnel. Des faits qui relèvent davantage du grotesque que de la bonne gouvernance.
Mais là où cette affaire prend une tournure surréaliste, c’est dans la réaction du délégué du personnel, un courageux, Idriss Ndoumba Soungalo. Face à ces révélations accablantes, il ne trouve rien de mieux que de condamner fermement les fuites et de s’évertuer à rassurer sur la bonne santé de l’entreprise. Ce zèle à défendre l’indéfendable lui vaudra même un encart dans le quotidien L’Union, rapidement retiré du site internet, comme pour effacer un faux pas trop évident.
Ce spectacle est désolant. Dans une entreprise bien gérée, de tels scandales auraient conduit à une prise de responsabilités immédiate, voire à des démissions. Dans un pays où les institutions fonctionnent correctement, les employés seraient descendus dans la rue, et un conseil d’administration extraordinaire aurait été convoqué. Mais ici, rien. Juste une omerta qui, hélas, est devenue la norme.
Certes, un précédent récent pourrait offrir une lueur d’espoir. En octobre dernier, Jean Éric Raynald Ndama, président-directeur général de La Poste S.A., ainsi que dix hauts cadres de l’entreprise, ont été suspendus par la ministre de la Communication et des Médias, Laurence Ndong. Une décision saluée pour son courage et sa rigueur. Mais peut-on espérer un traitement similaire pour Gab’Oil ? Rien n’est moins sûr.
Cette affaire, bien que scandaleuse, n’est que le symptôme d’un mal plus profond : l’impunité généralisée qui gangrène nos institutions et nos entreprises publiques. Tant que cette culture du silence et du laxisme persistera, d’autres affaires comme celle de Gab’Oil continueront de voir le jour, affaiblissant non seulement les entreprises concernées, mais aussi l’économie nationale dans son ensemble.
Alors, que faire ? Exiger des comptes. Refuser de détourner les yeux. Exiger des dirigeants qu’ils assument leurs responsabilités. Car, à ce stade, fermer les yeux sur Gab’Oil, c’est accepter que l’inacceptable devienne la norme.