En 2016, après les violences post-électorales de 2016, vous aviez été arrêté, détenu plusieurs mois dans des conditions extra-judiciaires, dans un endroit tenu secret, Pouvez-vous revenir sur cet épisode tragique de votre vie ?
Le 31 Août 2016, en rentrant sur Libreville en provenance de Moabi avec M. Jean Blaise KOUMBA NZANZI, ancien sénateur et ancien maire de la ville de Moabi, où nous y étions faire campagne et voter pour le candidat de l’opposition Jean PING, nous avons été arrêtés à Lambaréné, conduits au commissariat de Marteau dans le 2e arrondissement. Nous avons été forcés de nous dénuder totalement, jetés en cellule et le lendemain libérés par ordre du procureur sans justification.
Le 22 décembre 2017, après un meeting à Awendje, j’ai échappé à un kidnapping à Nzeng ayong, le 02 janvier 2018, soit 11 jour plus tard, aux environs de 19 heures, je suis à nouveau pris en charge par les mêmes individus qui m’ont tendu un guet-apen à l’entrée de mon domicile. Pendant la course poursuite, ils ont ouvert le feu à plusieurs reprises sur ma voiture et n’ont cessé de me percuter afin de m’imobiliser, cette course poursuite digne d’un film western et d’une rare violence a pris fin à la hauteur de I.A.I où je suis neutralisé, extrait de mon véhicule manu militari, menotté, encagoulé, et conduit dans la forêt de la Cité de la Démocratie et ensuite à la Direction générale de la contre-ingérence et de la sûreté militaire ( B2) où j’ai été gardé au secret pendant 306 jours. Un endroit où j’ai subi toutes sortes d’humiliations, de tortures morales et physiques.
Qu’elles étaient vos conditions de détentions ?
Les conditions de détention sont humaines, dignes du moyen âge. J’ai par exemple passé 3 mois sans prendre une douche ou me brosser. Ils m’ont infligé plusieurs types de tortures : je dormais, non seulement menotté les mains derrière le dos, la tête encagoulé, et ensuite scotché par-dessus cette cagoule, j’ai été torturé à l’électricité, j’ai même subi la torture par immersion etc…
Avez-vous l’impression pendant votre détention que vos ravisseurs pouvaient à tout moment vous ôter la vie ?
Le niveau de tortures pendant les premiers mois était tellement insupportable, j’avais même perdu l’envie et l’espoir de vivre, ce qui me poussait à poser des actes de rébellion pour les pousser à abréger mes souffrances, il y a des nuits où j’ai même imploré l’Éternel de mettre fin à mes jours.
Connaissez-vous les noms de vos ravisseurs ? Si oui, le régime d’Ali Bongo Ondimba que vous avez combattu est tombé, avez-vous l’intention de porter plainte à vos bourreaux ?
Oui ! Je les connais tous en détail. Je vous rappelle qu’après avoir passé 306 jours au B2, j’ai été encore jeté en prison pendant 1 ans pour outrage au président de la République, par la même Justice qui est restée muette au sujet de mon kidnapping.
J’ai voulu porter plainte à ma sortie de prison, comme la Justice a refusé de recevoir ma plainte, j’ai néanmoins saisie toutes les grandes représentations diplomatiques et les autorités de l’époque, ensuite j’ai saisi un avocat, qui ett prêt à introduire une plainte à Paris, mais au regard de la situation politique actuelle, je suis d’abord entrain de recenser toutes les victimes ou parents des victimes et ensemble nous allons faire une plainte individuelle et Collective.
Avez-vous toujours peur malgré le depart de Ali Bongo du pouvoir ?
Ma peur réside dans le faite de voir les mêmes qui ont saboté la Constitution de 1991en votant les lois anti-démocratiques, comme la non limitation des mandats, l’élection à un tour… qui ont soutenu Ali Bongo en 2009 pour leurs intérêts personnels et ont pillé le pays, mais n’ont pas hésité de le lâcher dès qu’ils ont perdu leurs privilèges. Et aujourd’hui ils reviennent en robe blanche proposer encore des lois exclusifs comme l’article 46 qui donne la part du lion aux fonds de commerce familiaux appelés partis politiques, tout comme l’article 47 qui exclut près de 75% des gabonais au débat politique sous prétexte qu’on n’a pas 50 ans. Juste parce qu’ils veulent faire passer les lois qui vont leurs octroyer plus des privilèges au détriment du peuple et protéger leurs biens malhonnêtement acquis.
Votre mot de fin.
Merci de m’avoir donné l’occasion de m’exprimer. S’il y a un conseil que je donnerai aux dirigeants de la transition, c’est d’être vigilant, car les Bongo sont tombés mais le système demeure dans le PDG comme dans l’opposition, ils ne vont jamais vous proposer un projet en faveur du peuple, parce que vous risquez d’être aimé. Sachez qu’ils n’hésiteront pas à vous diaboliser le moment opportun.