Le président de la transition gabonaise vient d’offrir des présents de naissance et une somme mirobolante à un nouveau-né baptisé… Brice Clotaire Oligui.
Il est des moments où un nourrisson devrait avoir la décence de ne pas pleurer. Sur un cliché photographique récemment capté dans la ville gabonaise de Tchibanga, un nouveau-né grimace, alors qu’il est dans les bras de Jonathan Ignoumba. Ce n’est pas seulement le respect protocolaire qui aurait dû inspirer à l’enfant un sourire au ministre de l’Agriculture : ce sont les présents que ce membre du gouvernement est venu lui apporter.
Ce n’est pourtant pas la période de l’Épiphanie et l’illustre visiteur n’est ni un roi mage ni le ministre gabonais de la Protection de l’enfance : il n’est « que » l’émissaire du président de la transition, chef de l’État de facto et ministre de la Défense et de la Sécurité. Brice Clotaire Oligui Nguema a tenu à offrir un trousseau et une enveloppe de 5 millions de F CFA (environ 7 600 euros) à cette famille du chef-lieu de la province gabonaise de la Nyanga.
Quel mérite ont donc ce bébé et ses parents pour être aussi généreusement dotés ? À la déclaration de naissance, le père a décidé de nommer son fils Brice Clotaire Oligui Ikapi, en hommage à l’ancien commandant de la Garde républicaine gabonaise qui a renversé, le 30 août 2023, le président à peine « réélu », Ali Bongo Ondimba.
« Business des poupons homonymes »
Lors de la visite du ministre de l’Agriculture à son domicile, le père du nouveau-né n’a pas manqué de rajouter une couche à son hommage, remerciant publiquement Oligui Nguema pour son geste du jour, mais aussi pour le « coup de libération » d’août 2023.
Parmi les commentateurs de la Toile, des Gabonais affirment reconnaître, dans cette séquence, une « politique du ventre » qui, elle, ne sera démodée par aucun régime politique. Dans la presse, des éditorialistes plutôt satiriques se gaussent. Sur gabonreview.com, « Aïeul Barack » dénonce un « business des poupons homonymes du président » lancé par ce « “bébé Oligui Nguema” à 5 millions ». Une pratique de « largesses » contre « allégeance » qui laisse dubitatif.
Les régimes populistes sont souvent gangrénés par un culte de la personnalité dont on ne sait pas toujours s’ils en sont les instigateurs ou les victimes inconscientes. Les parents du nouvel Oligui avaient-ils planifié toute l’opération sur le dos d’un bébé qui ne pouvait que pleurer sur la photo ? Espérons que le parcours politique prochain du général de brigade ne sera pas un lourd fardeau pour le futur adolescent.