Au Gabon, les dépenses électorales sont en constante augmentation. Pour les élections présidentielles de 2023, le gouvernement a alloué près de 50 milliards de francs CFA (environ 76 millions d’euros) pour organiser le scrutin. Ce montant représente une hausse de 25 % par rapport aux élections de 2016, où le coût était de 40 milliards de francs CFA. Cette hausse soulève des interrogations sur la gestion des ressources publiques dans un pays où près de 30 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté.
Un coût élevé pour des résultats décevants
Le Gabon, riche en ressources naturelles, notamment le pétrole, souffre d’un paradoxe économique où la richesse ne se traduit pas en développement pour tous. En 2022, le PIB par habitant était d’environ 8 500 dollars, mais la croissance économique stagnait autour de 2,4 %, insuffisante pour répondre aux besoins d’une population jeune et en demande d’emplois. Les dépenses électorales, qui pourraient être investies dans des infrastructures, l’éducation ou la santé, sont donc perçues comme une opportunité manquée.
De plus, le coût des élections ne se limite pas aux dépenses directes. Les élections au Gabon sont souvent accompagnées de tensions politiques, de manifestations et d’instabilité, ce qui peut entraîner des coûts indirects significatifs. En 2016, les violences post-électorales ont causé des pertes économiques estimées à 200 millions de dollars, selon des analyses économiques. Ces pertes ne font qu’alourdir un endettement déjà préoccupant.
Endettement et dépendance économique
Le Gabon est actuellement confronté à un niveau d’endettement qui ne cesse d’augmenter. En 2023, la dette publique s’élevait à environ 7 288 milliards de francs CFA (environ 11,1 milliards d’euros), représentant près de 70 % du PIB. Une part importante de cette dette provient de l’emprunt pour financer des projets d’infrastructure, mais également pour couvrir les déficits budgétaires exacerbés par des dépenses électorales croissantes.
L’internationalisation de la dette gabonaise est également préoccupante. Environ 60 % de la dette est détenue par des créanciers étrangers, exposant le pays à des risques de change et d’augmentation des taux d’intérêt. En 2023, le Gabon a dû renégocier plusieurs de ses prêts, un signe alarmant de sa vulnérabilité financière.
Vers un modèle de développement durable
Il est essentiel de repenser le modèle de financement des élections au Gabon. Les fonds publics pourraient être mieux utilisés pour promouvoir le développement économique, réduire la pauvreté et améliorer les infrastructures. Par exemple, en allouant ne serait-ce qu’un tiers des dépenses électorales (environ 16 milliards de francs CFA) à des projets de développement, le Gabon pourrait réaliser des avancées significatives dans des secteurs tels que l’éducation, la santé ou l’agriculture.
Le développement d’un cadre législatif pour réguler les dépenses électorales pourrait également contribuer à réduire les coûts. Des pays comme le Sénégal ont réussi à instaurer un financement public des partis politiques, limitant ainsi les dépenses des candidats et réduisant les inégalités dans l’accès aux ressources.
Un choix crucial pour l’avenir
Les coûts électoraux au Gabon sont symptomatiques d’un système qui privilégie les dépenses immédiates au détriment d’un développement économique durable. Alors que le pays fait face à des défis socio-économiques majeurs, il est crucial de trouver un équilibre entre les dépenses électorales et les investissements dans le bien-être de la population.
Le Gabon doit impérativement s’interroger sur la nécessité de ces dépenses et sur leur impact sur l’endettement national. Un repositionnement des priorités budgétaires pourrait non seulement réduire le coût des élections, mais également favoriser un développement inclusif et durable, bénéfique pour toutes les couches de la population. Au final, la question n’est pas seulement de savoir combien coûte une élection, mais quel type de Gabon nous construisons à travers ces choix financiers.