Les revendications matérielles au détriment des valeurs
« L’opinion comprendrait d’autant plus facilement ces avantages si elle était satisfaite des prestations de la justice », a déclaré Paul-Marie Gondjout. Le ministre a mis en exergue le décalage entre les attentes des citoyens et les résultats des juridictions. Cette insatisfaction générale, exacerbée par des dysfonctionnements notoires, alimente un scepticisme grandissant envers l’indépendance et l’efficacité du système judiciaire.
Parmi les critiques, des dysfonctionnements récurrents ont été énumérés : maintiens en détention arbitraires, retards dans le traitement des dossiers et disparitions de pièces judiciaires. « Ces réalités menacent la bonne administration de la justice », a affirmé le Garde des Sceaux.
Un coût élevé pour une justice perfectible
Le ministre de la Justice a questionné la pertinence d’une augmentation des dépenses publiques dans un contexte où la qualité du service judiciaire reste discutée. « Dans l’actualité, l’opinion pourrait-elle comprendre que la satisfaction des revendications actuelles des magistrats coûterait à l’État plus de 25 milliards de francs CFA par an alors qu’elle n’est pas du tout satisfaite du rendu de la justice ? » s’est-il interrogé.
Ce constat mérite une introspection collective. Selon Paul-Marie Gondjout, « il y a un lien indéfectible entre vos devoirs et vos droits », une invitation aux personnels judiciaires à réfléchir sur leur responsabilité dans la dégradation du service public.
Indépendance judiciaire et réformes structurelles
Le ministre a tenu à rappeler que l’indépendance de la justice est consacrée par l’article 111 de la Constitution. Toutefois, il a souligné que cette indépendance est indissociable de la soumission à la loi et de la responsabilité des magistrats envers le peuple gabonais.
Il a également mis en avant la nécessité de repenser l’organisation et le fonctionnement de la justice, à travers une « autopsie de l’écosystème organisationnel et fonctionnel de la justice ». Les rapports d’inspection révèlent une marge de progression importante, appelant à des réformes structurelles.
Une planification politique indispensable
Dans son allocution, Paul-Marie Gondjout a reconnu que les problèmes du système judiciaire relèvent de multiples facteurs. Cependant, il a averti que les solutions ne peuvent être ni instantanées ni indéfiniment reportées. « En l’occurrence, la priorité du président de la République et du gouvernement est donnée à l’amélioration de l’environnement professionnel des magistrats et greffiers », a-t-il souligné.
Le ministre de la Justice a appelé à une responsabilisation accrue des magistrats et à une justice à la hauteur des attentes des citoyens. En dépit des défis économiques et organisationnels, il a réitéré la volonté du gouvernement de travailler à l’établissement d’un système judiciaire plus efficace et plus équitable.
La réaction des magistrats, qui revendiquent depuis 2023 l’adoption d’un nouveau statut particulier, est très attendue.