Pouvez-vous vous présentez ?
E.R : A l’Etat civile Eric RAIVIRE.
Auteur et Consultant Expert gabonais, originaire de Port gentil, capitale économique du Gabon du reste ma ville natale. Je suis par ailleurs, Ingénieur Agronome de formation, et Certifier Expert en agronomie de la canne à sucre et en Industrie sucrière. Membre affilié de l’Association française de Canne à Sucre (AFCAS) depuis 2018.
Je totalise plus de 13 ans d’expérience en continu dans le consulting de certaines sucreries francophones, dont celle du Gabon en qualité de Coordonnateur Technique aux Sucreries du Gabon SA.
Pourquoi avoir écrit ce livre, quel en était le contexte justifiant cette démarche ?
E.R : Pour deux raisons toutes simples.
La première relevait d’une initiative et volonté personnelle de partage d’expérience, vécues dans cet univers passionnant et challengeant de la sucrerie francophone et particulièrement celle du Gabon.
J’ai estimé qu’il était enfin temps… !
Temps pour moi de parler, d’exprimer mon ressenti, ma vision, mes inquiétudes autours de cette merveilleuse culture tropicale enjeu de développement économique entièrement encrée dans les habitudes de consommations des peuples du monde et d’Afrique.
Temps pour moi de retransmettre par procuration, le savoir-faire acquis et consolider à travers une expertise avérée et reconnue dans le domaine de l’industrie sucrière gabonaise et francophone après plusieurs années d’exercice au plus haut niveau technique.
Temps pour moi de restituer aux générations futures, ce récit, fait de rencontres professionnelles, mais surtout de recentrer le rôle déterminant pour les managers d’exploitation agricole ce que représente un itinéraire technique en tant qu’outil de pilotage, de stratégie de développement et de croissance, cas appliqué dans l’industrie sucrière gabonaise.
Cette initiative, se présentait à moi comme une impérieuse nécessité dans l’ordre des choses. Comme pour reprendre la maxime du célèbre philosophe chinois Confucius : « Ce qui n’est pas écrit n’existe pas, et ce qui n’est pas à jour ne sert à rien … ». Ecrire, et mettre à jour le condensé d’un savoir-faire capitalisé me paraissait simplement une essentielle évidence pour la l’humanité et postérité.
La seconde raison est plus circonstancielle. C’est à la faveur des cinquante ans (50 ans) de l’industrie sucrière gabonaise en 2025 que j’ai perçu la nécessité humaniste et professionnelle d’apporter ma contribution en tant qu’expert du domaine.
C’était pour moi l’opportunité de parler de ce métier si singulier dans le paysage agricole africain et gabonais, mais surtout mettre en lumière les mutations observées au cours de ces cinq dernières décennies, parler des fragilités du secteur, notamment l’influence des aléas climatiques sur le maintien durable de la productivité agricole, la dépendance du pays aux importations pour compléter la demande en sucre du marché intérieur, parler des succès, et de proposer des perspectives et challenges avenirs liés au dynamisme de la filière pour les 30 prochaines années.
Quel est votre regard sur l’agriculture et particulièrement de l’industrie sucrière gabonaise cinquante ans après ?
E.R : Pour parler de l’agriculture gabonaise, nous avons tant à faire et le chantier est « herculéen » tant il nécessite encore plus d’engagements fermes des pouvoirs publics en la matière.
La seule statistique annuelle du Ministère de l’Economie et des Participations de plus de 400 Milliards de F CFA en dépenses d’importations des denrées de bases céréales stratégiques (riz, blé, Mais…) produits carnés (Viande, poulet, dinde …) Conserverie (Boites de conserves en tous genres…) traduit les efforts importants à consentir pour une meilleure dynamisation de ce secteur qui rappelons le, contribuait dans les années indépendance à hauteur de 15% du PIB contre moins de 3% aujourd’hui. On serait tenté de se demander que s’est-il passé entre tant pour justifier un tel déclin ?
Plusieurs raisons d’ordres économiques et psychosociologiques peuvent être avancées notamment l’effet collatéral des politiques économiques des années 1970 avec le tournant du « tout pétrole » et l’époque du « Boom pétrolier ». Mais aussi l’impact que cela a eu dans la conscience collective des gabonais pour qui désormais travailler dans un bureau était le seul critère d’appréciation de la réussite sociale.
Malgré donc les nombreuses initiatives et projets structurants, le pays a eu énormément du mal à capitaliser dessus… Plus récemment la Politique Nationale de Sécurité Alimentaire et Nutritionnelle (PNSAN vision 2017 – 2025), le Programme GRAINE … ont difficilement apporté les résultats escomptés.
Donc Oui, l’Agriculture gabonaise peine toujours à décoller, et mérite une autre approche de gestion par les résultats. Nous avons énormément de travail à ce propos.
S’agissant plus précisément de l’industrie sucrière gabonaise, c’est l’un des rares secteurs qui a sût résister à tous les mouvements et orientations stratégiques des politiques économiques depuis les années 70.
Malgré des contextes conjecturelles des privatisations intervenues en 1999 (passage de Sosuho à SUCAF Gabon), puis récemment en avril 2024 (passage de SUCAF Gabon à Sucreries du Gabon SA.) avec la prise des capitaux par le consortium Turc MFB International, la filière et les acteurs font preuve de beaucoup de résilience et de volonté pour la pérennité de ce fleuron industriel qui nous donne tous les jours la satisfaction de consommer un produit local, fait avec une expertise nationale de qualité et c’est en cela que le pays doit en être fier pour davantage soutenir la filière sucrière et l’aider à davantage se moderniser car elle est d’un enjeu majeur de notre souveraineté alimentaire
Vous qui avez été actif dans ce secteur d’activité, quels sont les réelles difficultés qui plombent le plein développement de la filière sucrière gabonaise ?
E.R : C’est une excellente question, et c’est également l’un des pans importants qu’il convient de mettre en lumière. La filière souffre d’importants défis logistiques liés à l’approvisionnent en sucre du marché. Le déficit en infrastructure routier rend l’approvisionnement et la disponibilité du sucre plus complexe, surtout en période pluvieuse où la principale route économique est impraticable. Aujourd’hui, le sucre est un aliment de consommation pleinement encrée dans les habitudes culinaires des populations gabonaise qu’une absence de cette denrée est très vite remarquée et suscite des passions et des invectives du principal opérateur : Les Sucreries du Gabon SA. Pourtant le circuit d’approvisionnement est une chaine, dont les logisticiens comme TRANSFORM, AGL, SETRAG ont chacun leur part à jouer. Avec la récente dotation du gouvernement en matériel TP aux différentes Direction provinciales du Ministère des TP, nous espérons un meilleur entretien des voies d’approvisionnement pour ainsi disponibiliser le sucre au plus près des consommateurs.
Outre, le volet logistique et transport, la filière a tous les atouts pour se développer, des terres extensibles en cours de valorisation, une expertise avérée pour améliorer les productivités cannes et sucre, et des investissements importants avenirs nous laissent croire que des meilleures perspectives sont à prévoir.
Quid des enjeux et opportunités de la filière sucrière gabonaise à court et moyen termes ?
E.R : En 2024, la population gabonaise est estimée à environ 2 Millions d’habitants. Avec un taux croissance démographique estimé à 2,5 – 3% par an, selon les perspectives économiques des Nations Unis, d’ici 2050, la population gabonaise pourrait augmenter de +1 500 000 Hab en 25 ans pour avoisiner 3,5 et 4 Millions d’habitants. Cette augmentation démographique n’est pas sans conséquences puisqu’elle s’accompagne systématiquement d’un accroissement des besoins en sucre de +25 à +30 000 Ts/an et passerait la demande du marché intérieur de 40 000 Ts/an actuel à 80 000 Ts à l’horizon 2050.
La problématique est donc toute simple :
L’industrie sucrière gabonaise dans son fonctionnement actuel est-elle préparée à ses changements ? Les mécanismes de projections économiques sont-ils adaptés pour répondre aux besoins de consommation en sucre d’un marché local et africain en forte croissance ? Comment le Gabon et l’Afrique se positionne sur ce créneau pour contrer les surproductions annoncées des gros pays producteurs mondiaux que sont le Brésil, l’Inde, la Chine ? Quid du choix de notre positionnement en termes de modèle économique et de l’impact sur la part contributive de ce secteur dans la production de richesse d’ici 2050 ?
C’est autant de questions et de challenges que les acteurs de la filière sucrière gabonaise et par extension africaine doivent se poser pour mieux anticiper l’avenir, et orienter les politiques dans le cadre d’une vision programmatique qui réponde très précisément au modèle agricole que voulons pour demain.
C’est aussi, tout le sens de la démarche de cet ouvrage, faire le bilan 50 ans après, pour dessiner au mieux un modèle de projection et un meilleur avenir de cet industrie agricole aujourd’hui à la croisée des chemins.
Qu’en est-il à long termes ?
E.R : L’avenir de la filière sucrière gabonaise s’inscrit également dans une dynamique de stratégies intégrées et globalisées à travers l’espace communautaire sous régionale CEMAC.
Cet espace aujourd’hui couvre un marché potentiel de 66 Millions d’habitants pour une production moyenne de 1,3 Millions de tonne par an. A l’horizon 2050 les besoins en sucre dans cet espace devraient atteindre les 2 Millions de tonne par an.
Dans le cadre du renforcement de la compétitivité de cette zone économique et d’échange, il serait bon que des politiques soient développées dans un cadre d’exercice commun à l’image de la PAC (Politique Agricole Commune) dans l’espace européen ou du Mercosur (dans la zone sud-américaine), et qui ont constitué des leviers importants pour le développement de l’agriculture et des filières agricoles dans ces espaces. La CEMAC devrait s’en inspirer et adapté ces modèles de succès à nos réalités et permettre ainsi un meilleur essor économique et moins impactés nos économies face aux fluctuations des marchés.
C’est donc une vision ambitieuse, et un leadership plus affirmé que les Etats membre de notre espace communautaire devraient travailler à favoriser un cadre normatif plus flexible et intégrateur valorisant le potentiel et les forces de chacun des états membres. Un marché de 100 Millions d’habitants pèse beaucoup plus que chacun de nos marchés de la sous-région pris individuellement, nous devrions ainsi bénéficier d’un effet groupe pour accélérer la transformation économique et ainsi mieux développer nos filières.
Un dernier mot ?
E.R : Simplement inviter humblement nos décideurs à regarder avec attention ce fleuron de notre industrie encore en activité après 50 ans d’existence fait de balbutiements, mais dont l’horizon est plein d’espérance et à portée de main. L’industrie sucrière gabonaise est un patrimoine de l’Etat, hérité de la vision de développement de Feu le Président Omar Bongo ONDIMBA et qu’il convient de davantage la soutenir.
C’est un plaidoyer que je lance pour davantage consolider cet acquis industriel et le savoir-faire capitalisé depuis plus d’un demi-siècle. Il y va de notre engagement et responsabilité pour la pérennité des emplois des gabonais et le dynamisme de notre tissu économique.
Où peut-on se procurer cet ouvrage ?
E.R : Pour le moment, le livre est disponible à l’international via le réseau de librairies Hachette France.
Il peut être commandé en ligne par le biais de la plateforme de distribution Amazone, ou directement sur le site internet des Editions Jets d’encre : http://www.jetsdencre.fr.
Nous travaillons actuellement en avec le réseau de librairie locale pour le rendre disponible courant janvier/février 2025. Sinon pour toutes informations complémentaires vous pouvez les adresser par mails : ericraivire63@gmail.com // eric6raivire3@gmail.com
RAIVIRE merci, et félicitation pour cette œuvre…
E.R : C’est moi qui vous remercie de cette éclairage essentiel que vous apportez à cette industrie importante pour l’économie agricole et le rayonnement économique de notre pays.
Aussi, je vous adresse mes sincères encouragements et bonne continuation pour le travail remarquable que vous faites, et votre contribution nécessaire au décloisonnement de l’information et son accessibilité à toutes les couches sociales de notre pays par le biais du digital.