Une qualité de manganèse controversée
La teneur en manganèse de Lafoube est décrite comme « très médiocre ». Même avec l’aide de la technologie DMS exploitée par une société sud-africaine, il semble difficile d’atteindre une qualité compétitive sur le marché international (au-delà de 40 %). Selon des sources internes, les niveaux de fer dans ce gisement dépassent les normes autorisées, rendant l’exportation particulièrement compliquée.
NGM aurait envisagé de construire une usine de frittage pour valoriser ce minerai de faible qualité, mais le projet a été jugé non viable financièrement par la direction. Cette impasse amène NGM à envisager de vendre ce manganèse de moindre qualité au groupe chinois CITIC, dont la base se trouve à Kalikak.
Comment NGM peut-elle vendre du manganèse de qualité inférieure à d’autres mineurs, alors qu’il n’existe aucune disposition à ce sujet dans la Convention minière ? De plus, si SETRAG transporte du manganèse, où sera déchargé ce manganèse ? Ce manganèse de qualité inférieure sera-t-il déchargé à Ndjolé ou à l’Owendo Mineral Port, filiale d’Arise P&L ? Sera-t-il signalé au ministère des Mines ? Comment NGM s’assurera-t-elle que cette quantité de qualité inférieure est vendue à CITIC et que les taxes sont payées, car les taxes sont dues sur la quantité exportée, tandis que la vente intérieure n’est pas autorisée ?
Ainsi, la faisabilité de cette transaction reste floue, car elle soulève des questions réglementaires sur le reporting, la logistique et le paiement des taxes.
Défis de transparence et gestion des devises
Outre les défis techniques, les pratiques de gestion financière suscitent également des préoccupations. Les recettes des ventes de manganèse exporté ne transitent pas par les banques gabonaises. Elles sont créditées sur des comptes offshore situés à Maurice et en Europe, une pratique qui, bien qu’habituelle dans le secteur, contribue à une pénurie chronique de devises au Gabon.
L’administration gabonaise est capable de contrôler les volumes exportés via des plateformes comme OMP, mais elle ne dispose d’aucun moyen pour vérifier les montants réels des ventes déclarées. Cette situation perpétue une perte de revenus fiscaux pour le pays et limite la capacité de l’État à encaisser les devises générées par ces exportations.
Les enjeux pour le Gabon
Ces pratiques mettent en lumière les problématiques de souveraineté économique. En 2023, les banquiers gabonais avaient plaidé auprès du président, le général Brice Clotaire Oligui Nguema, pour que les revenus d’exportation soient rapatriés au Gabon, afin d’assurer un meilleur contrôle des flux financiers. Mais cette réforme reste en attente, probablement en raison de pressions extérieures.
Par ailleurs, la composition et le contrôle des actionnaires de NGM restent opaques. Les véritables bénéficiaires des sociétés investissant dans le manganèse gabonais sont méconnus, même des banques locales qui financent leurs activités.
Alors que NGM cherche à surmonter les défis posés par le plateau de Lafoube, de nombreuses questions restent en suspens. Ces problématiques techniques, réglementaires et financières soulignent la nécessité d’une réforme plus transparente du secteur minier, afin que les ressources naturelles du Gabon profitent pleinement à son développement économique.
Une analyse plus approfondie de la structure actionnariale de NGM sera abordée dans la prochaine partie de cette série.