Libreville, le 28 février 2020
Il y a un an, le 28 février 2019, nous, Placide Aubiang Nzeh ; Noël Bertrand Boundzanga ; Elza Ritchuelle Boukandou ; Franck Ndjimbi ; Nicolas Nguéma ; Jean Gaspard Ntoutoume Ayi ; Anges Kevin Nzigou ; Marc Ona Essangui ; Edgard Owono Ndong ; et Minault Maxime Zima Ebeyard.
Nous sommes présentés devant le pays et à la face du monde pour dire à nos compatriotes combien il était urgent d’agir.
Nous l’avons fait en responsabilité, en tant que citoyens, respectueux des lois de la République et soucieux de sauver notre vivre ensemble du péril qui le menaçait. Nous l’avons fait parce que depuis le 24 octobre 2018 et l’accident vasculaire cérébral dont avait été victime Monsieur Ali Bongo, chaque Gabonaise et chaque Gabonais, quel qu’il soit, se posait cette question sans pouvoir y apporter une réponse : Qui dirige le Gabon ? Le monde entier s’interrogeait lui aussi avec la même inquiétude.
Alors que le Chef de l’Etat se trouvait depuis plusieurs mois en incapacité d’exercer les charges de sa fonction, l’imposture s’était progressivement installée au vu et au su de tous. Soucieux de l’urgence du retour à un fonctionnement conforme à la Constitution, nous avons saisi les institutions de la République, notamment le Sénat, l’Assemblée Nationale, le Gouvernement, la Cour Constitutionnelle et la justice, afin qu’elles prennent leurs responsabilités.
Nous nous sommes aussi adressés au Corps social, à savoir les organisations de la société civile, les confessions religieuses, les syndicats et les formations politiques afin de les convaincre de l’urgence de la situation. Nous n’avons pas manqué d’alerter la communauté internationale qui ne pouvait se contenter d’observer sans agir. Et parce que cette situation concerne au premier chef chaque Gabonaise et chaque Gabonais, nous nous sommes directement adressés à nos compatriotes et avons, à de nombreuses occasions, échangé avec eux.
En réponse à notre démarche qui ne vise qu’à éviter à notre pays le péril qui le menace, au mépris de l’intérêt supérieur de la Nation, ces compatriotes qui détiennent l’ensemble des leviers du pouvoir d’Etat ont fait le choix de la conservation du pouvoir à tout prix. Ces femmes et ces hommes ont fait le choix du déni et de la compromission. Confrontés à notre insistance et notre détermination, ils ont répondu par l’intimidation et la menace.
Le déni dans lequel se sont enfermés les responsables de nos institutions n’a pas suffi à faire disparaitre la menace qui justifiait notre appel, bien au contraire. Dans les mois qui ont suivi et jusque dans la période récente, les fondements de la République ont été éprouvés les uns après les autres comme jamais. Alors qu’en République, donc au Gabon, ce sont les institutions qui détiennent le pouvoir d’Etat et ont seule compétence pour l’exercer, des fonctionnaires se sont notoirement emparés de la direction du pays avec la complicité effective du Gouvernement, du parlement et de la Cour constitutionnelle. Plutôt que d’exercer pleinement leurs mandats constitutionnels, les responsables de nos institutions ont privilégié la préservation des positions de pouvoir et des avantages qu’ils en tirent. Et cette situation se perpétue comme si l’épisode précédent n’avait servi de leçon à personne et que seul comptait la conservation des positions acquises.
La compromission dans laquelle les institutions se sont abandonnées laissera pour longtemps des traces dans notre pays. Le recours à la photocopie de la signature du président de la République, donc l’usurpation de sa décision ne peuvent désormais plus être exclus. La reconduction par vidéo, depuis Rabat au Maroc, des principaux collaborateurs du président de la République, la nomination dans les mêmes conditions du Premier ministre et de son gouvernement ont consacré en janvier 2019 le règne de l’imposture au sommet de l’Etat.
La question se pose aujourd’hui de savoir dans quelles conditions des officiers supérieurs des forces de défense et de sécurité ont été élevés au grade de général en août 2019. La régularité de la désignation des membres de la Cour Constitutionnelle le 06 septembre 2019, annoncée dans la presse privée à l’initiative des bénéficiaires, soulève elle-aussi les doutes les plus sérieux. Comment un pays fait-il pour se remettre d’une Cour constitutionnelle frauduleusement constituée ?
Pour l’observateur averti comme pour chaque Gabonaise et chaque Gabonais, c’est l’imposture qui désormais dirige le Gabon.
Combien de fois n’avons-nous pas entendu proclamer depuis un an le retour définitif d’Ali Bongo se portant désormais bien, et même très bien ? Qui peut aujourd’hui contester la réalité que révèlent depuis un an les photos et vidéos, pourtant modelées avec soin par les meilleurs spécialistes en image, dans lesquelles Monsieur Ali Bongo est présenté sous son meilleur jour.
Nous devons à la vérité de reconnaitre et de dire que la vacance de la Présidence de la République s’impose à notre pays et que ni les menaces à l’endroit des citoyens qui en responsabilité le demandent, ni les postures opportunistes de celles et ceux qui proclament le contraire ne changeront cette réalité. Oui, la déclaration de la vacance de la Présidence de la République est la seule réponse pacifique et responsable à la situation de crise sans précédent dans laquelle se trouve notre pays et qui ne profite qu’à la minorité de compatriotes qui ont choisi de se servir de cette situation dramatique pour piller les caisses de l’Etat et se maintenir au pouvoir à tout prix.
POUR LE GABON, AGISSONS !