Une surpopulation carcérale dramatique
Selon Kenneth Jimmy Lendoy, la prison centrale de Libreville est un “camp de concentration” où s’entassent plus de 5 000 détenus alors qu’elle a été conçue pour en accueillir seulement 500. Il décrit un environnement insalubre et surchargé, où les prisonniers n’ont souvent pas la place de s’asseoir, de s’allonger ou même de rester debout.
Une justice en panne : des détenus en attente de jugement depuis des décennies
L’un des points les plus graves soulevés concerne les erreurs judiciaires et les longues périodes de détention provisoire. Lendoy cite des exemples accablants de prisonniers prévenus enfermés depuis 5, 10, voire 26 ans sans jugement. “Ce n’est pas normal”, répète-t-il, réclamant l’organisation urgente des barreaux criminels pour statuer sur le sort des nombreux détenus en attente de jugement.
Il affirme que certains prisonniers n’ont même plus de dossier judiciaire, ce qui les condamne à une détention sans fin. Le cas d’Emmanuel Ango Pierre, incarcéré depuis 17 ans sans trace de son dossier au tribunal, est emblématique de ce dysfonctionnement judiciaire.
Des conditions de vie indignes et une alimentation déplorable
L’ex-détenu décrit également des conditions de vie insupportables. La nourriture se limite à une baguette de pain distribuée entre midi et 14h, et une “portion d’aile bouillie à l’eau salée” servie en fin d’après-midi.
Pire encore, les repas sont préparés en brûlant du plastique faute de bois, provoquant des maladies graves, notamment des cancers et des infections pulmonaires. « Peut-on réellement tenir six mois de prison avec une baguette de pain et une portion d’aile ? » s’interroge-t-il.
L’accès à l’eau potable est un autre problème critique. Les détenus reçoivent de l’eau seulement deux fois par semaine, générant des bagarres pour se procurer le précieux liquide, souvent contaminé. « Cette eau est à l’origine de nombreuses diarrhées fatales », prévient-il.
Les “libérables” toujours en prison
Autre anomalie soulignée, la présence de “libérables”, c’est-à-dire des prisonniers ayant terminé leur peine mais toujours derrière les barreaux, faute de documents administratifs attestant de leur libération. Certains doivent attendre que leurs familles paient des frais informels aux tribunaux pour récupérer leur ordonnance de disqualification de motif.
Un appel au président pour une justice plus forte
Kenneth Jimmy Lendoy appelle le président gabonais à agir en urgence pour améliorer la situation carcérale. Il plaide pour un renforcement de la justice et une meilleure prise en charge des magistrats et greffiers afin d’accélérer les procédures. Il salue les réformes engagées par le Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI) et exhorte les autorités à poursuivre dans cette voie.
Ce témoignage met en lumière une réalité choquante qui interpelle les instances judiciaires et gouvernementales. Il reste à voir si ces révélations provoqueront une réaction concrète de la part des autorités, alors que les greffiers et les magistrats ont sont rentrés en grève en janvier dernier pour réclamer l’adoption d’un statut particulier régissant leur profession.