Selon Ndong Sima, le but de la réforme est de clarifier les pouvoirs du président de la République, « la réalité est que le président de la République disposait déjà de tous les pouvoirs qu’il a aujourd’hui et qu’on clarifie purement et simplement », a-t-il déclaré sur les antennes de RFI, interrogé ce 14 novembre. Cependant, les arguments avancés semblent faire écho aux critiques des partisans du « NON », qui dénoncent une dérive vers un régime présidentiel hypertrophié. Alors que le Premier ministre assure que cette concentration du pouvoir existe depuis la précédente Constitution de 2023, il peine à convaincre de la nécessité de renforcer davantage la figure présidentielle.
En révélant que le nouveau texte ne fait que « clarifier » les pouvoirs déjà détenus par le Président, Ndong Sima suscite des interrogations : si le président possédait déjà tous les leviers, pourquoi ce besoin impérieux de changement ? La contradiction de Ndong Sima réside dans la tentative de justifier une réforme profonde tout en minimisant son impact.
La suppression de son propre poste : une preuve d’objectivité ?
Le Premier ministre s’est dit « mal à l’aise sur ce point précis », face à la suppression de son propre poste dans cette nouvelle Constitution, tout en affirmant qu’il défend le projet pour l’intérêt général et non pour des raisons personnelles. Il rappelle que certains de ses prédécesseurs avaient également souhaité supprimer cette fonction, « Je rappelle que deux de mes anciens prédécesseurs à la fonction du Premier ministre ont indiqué que, pour eux, il fallait supprimer la fonction de Premier ministre parce que celui-ci avait des pouvoirs fictifs ». Toutefois, cette déclaration semble en décalage avec son rôle actuel de défenseur de la réforme, qui pourrait limiter le contre-pouvoir institutionnel face au chef de l’État. En endossant la suppression de sa propre fonction, Ndong Sima cherche à se poser en défenseur de l’intérêt national, mais cela masque difficilement le fait qu’il participe activement à une réforme centralisant les pouvoirs autour d’une figure présidentielle.
Un Parlement affaibli, un déséquilibre des pouvoirs ignorés
Parmi les points les plus sensibles, le pouvoir du Président de dissoudre l’Assemblée nationale, sans contrepoids réels du Parlement, a suscité des critiques. Cependant, pour Ndong Sima, « Nous verrons bien, dans la pratique, si ça pose des problèmes, comment on fait pour revenir dessus. », et propose de tester la nouvelle Constitution ensuite d’envisager si des ajustements seront nécessaires. Un argument qui sonne davantage comme une justification d’urgence que comme une réelle assurance. En insistant sur l’idée que l’on pourra « revenir dessus », il semble minimiser les inquiétudes légitimes sur l’affaiblissement des contre-pouvoirs.
La question de la justice sous contrôle présidentiel : un argument balayé
Les opposants au référendum reprochent également à cette révision de la loi fondamentale de maintenir le système judiciaire sous l’autorité présidentielle. Ndong Sima soutient que les critiques auraient dû être soulevées lors du dialogue national, tout en restant évasif sur les choix du président de la Transition, le Général Brice Clotaire Oligui Nguema dans la sélection des éléments de cette nouvelle Constitution. Il se contente d’indiquer que le processus de dialogue s’est déroulé sur deux mois, suggérant que les contestataires n’ont pas saisi leur chance d’intervenir. Une réponse qui peut paraître insuffisante face aux préoccupations de transparence et d’indépendance de la justice.
Une Constitution taillée sur mesure au profit du Général Oligui Nguema ?
Le Premier ministre rejette l’idée d’une constitution taillée sur mesure, mais il reconnaît que certains la percevront ainsi. Il tente de dissiper cette impression en soulignant les mesures visant à limiter le pouvoir héréditaire, en interdisant les descendants de présidents de se présenter. Pourtant, ce point se retourne contre lui, car il illustre bien l’ambiguïté de cette réforme : éviter une dérive monarchique tout en consolidant les pouvoirs d’un chef de l’État fort.
La question de la participation électorale
À deux jours du référendum, Ndong Sima se montre incertain quant au taux de participation, qu’il qualifie de « mécanique » en raison des contraintes, professionnelles, familiales, géographiques et climatiques. Les deux jours fériés accordés aux Gabonais pour faciliter leur vote traduisent une certaine appréhension quant à la mobilisation des électeurs.
Dans l’ensemble, les déclarations du Premier ministre Ndong Sima, laissent entrevoir une série de contradictions et de justifications qui peinent à convaincre. Tandis qu’il appelle les électeurs à approuver une Constitution censée clarifier les pouvoirs, la réalité semble suggérer un renforcement sans précédent de l’autorité présidentielle. Pour les électeurs, la question reste donc ouverte : cette réforme constitue-t-elle un réel progrès pour la démocratie gabonaise, ou bien une centralisation de plus des leviers de pouvoir ? Réponse le 16 novembre.